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REGISTRES DU BUREAU

[1548]

«id .1/ess^r' les Prevost des Marchans et Eschevins de la ville de Paris.

29 novembre 1548.

"Mess", j'ay donné charge au seigneur des Essars, Lieutenant de l'artillerye en ce pays de Picardie, present porteur, vous dire quelque chose de ma part qui concerne le bien et utilité de vostre ville, et je vous prie le croire et trouver moyen, s'il vous est possible, que le personnage qu'il vous nieyne face residence auprès'¹' de vous, pour user de la commodité qu'il a inventée ès environs d'Amyens, ainsi que led. s^r des Essars vous dira. Asseuré, paiée que j'en ay veu et entendu, que ce sera ung tel acommodement pour lo povre peuple et autre, que vous en serez cy après louez et eulx grandement tenuz à vous. Et en cest endroit, Mess", je prie Nostre Seigneur vous donner ce que desirez.

« A Ancre l'²', le xxix" jour de Novembre V^e xlviii.

"Vostre entierement bon amy

La Rochepot'³'."

Et après lecture faicte d'icelle, led. des Essars a dit pour sa creance que mond. s^r de La Rochepot avoit envoyé avec led. des Essars, en ceste ville, ung nommé Cornille, marchant d'Anvers, lequel puis nagueres avoit trouvé moyen de faire, ès environs d'Amyens, des tourbes, qui sont mottes de terre qui servent à brusler, à chauffer fours à chaulx, à plastre, à taintures, briques et tuilles, tellement que en peu de temps qu'il ont esté auprès dud. Amyens, et au moyen de leur invention, la brique qui soulloit estre chere est diminuée de la moictié de son pris, et que le povre peuple d'Amyens et des environs s'est acoustumé au faict desd, tourbes, dont ilz se peuvent chauffer ung jour entier, pour ung solz tournois et moings.

ll a semblé à mond. s^r le Gouverneur devoir envoyer led. Cornille en ceste ville de Paris, pour

trouver le moyen de faire desd, tourbes, qui seroit cause de faire abaisser le pris et faire grande espargné de boys, qui est de present en très grande charte; nous priant luy estre favorable, s'il treuve lieu propre et commode pour faire desd, tourbes, et que led. Cornille en avoit apporté quelque quantité par deça, pour en faire espreuve.

Au moyen de quoy, en la presence dud. s^r des Essars, avons faict allumer partie desd, tourbes et le reste gardées pour estre bruslées en la presence des Maistres des Euvres qui sont de present absens. Et quant partie desd, turbes ont esté allumées, mesd. s" ont mandé Pierre Renot, Bastian Picart, Pierre Paulmier et Robert Finet, maistres jurez mesureurs de charbon à Paris, Anthoine Gilbert, maistre tainturier, Claude Durant, Canonnier ordinaire du Roy et fondeur de l'artillerye, ausquelz mond. s^r le Prevost des Marchans a demandé qu'il leur sembloit desd, tourbes et s'ilz serviroient bien aux choses des-susdictes.

Lesquelz ont dit que autresfoys ilz en avoient veu de semblable et que le charbon valloit beaucoup myeulx, parce que le feu en est bien plus chault et que les cendres en sont bonnes, mais desd, turbes les cendres n'en vallent riens, sinon à fumer les terres. Et a esté trouvé qu'ilz ont une odeur fétide, et neantmoings qu'ilz pourroient bien servir aux povres gens et à faire espargné de boys, pourveu qu'il y en eust grande quantité el à bon marché.

Ce faict, mesd. s" ont advisé, au Bureau d'icelle Ville, que on rescriproit à mond. s^r de La Rochepot, Gouverneur de Paris, que, parce que led. Cornille est estranger et qu'il veult aller sonder le long des rivieres de ce pays s'il trouverra terre commode pour faire lesd, turbes, il y auroit danger qui ne voulsist tendre à autre fin; à ceste cause, qu'on doibt surceoir, jusques à avoir entendu la volunté du Roy. Et incentinant, lesd, lettres ont esté expediées et envoyées aud. s' Gouverneur.

-¹' Le Registre porte par erreur autant.

(2) Érigée en duché-pairie pour le duc de Luynes, en juin 1620, sous le nom d'Albert, cette ville de Picardie (canton de l'arrondissement de Péronne, Somme), cessa depuis lors de porter le nom d'Ancre, et conserva celui d'Albert.

(3) L'original de cette lettre est conservé aux Archives nat., K 957, n° 7.